23 – 27 août 2017

TMB : nouvelle épopée et nouveau défi pour l’équipe de choc BrBiJu !

Après l’échec de la Mort de Mars 2014 en Corse et les aventures rocambolesques islandaises en juillet 2016, nous avons suivi un entraînement de choc afin de pouvoir espérer une réussite dans les Alpes en août 2017. Cette année, le projet est encore plus ambitieux : réaliser le Tour du Mont Blanc en cinq jours. Cela représente, selon les options choisies, plus de 150 kilomètres en montagne, et pas loin de 10.000 mètres de dénivelé positif. Rien n’a donc été laissé au hasard !

Un entraînement de choc

De retour en France, Ju a repris un abonnement dans une salle de sports et s’est entraîné sur vélo. Quelques semaines auparavant, il s’est rendu au Pérou dans l’unique but de s’entraîner pour le TMB.

De son côté, Bi a lancé un vaste Plan d’Entraînement Intensif en poursuivant avec exigence la natation, en se mettant à la course à pieds et en réalisant quelques ascensions en Auvergne et dans les Pyrénées. Malheureusement, cet entraînement lui a causé une tendinite au pied gauche une semaine avant le départ pour les Alpes : malédiction !

Enfin, Br, désormais en couple, est doté d’un mental d’acier à toute épreuve, lui interdisant toute forme d’échec ou d’abandon.

Un équipement de pointe

Chaussures de randonnées, semelles, chaussettes haute technologie, bâtons de randonnée pour préserver son pied gauche endommagé, ibuprofène (le gouvernement ayant interdit insidieusement le Prontalgine sans ordonnance cet été)… Bi a investi dans un équipement de pointe pour déjouer la malédiction des blessures.

Poche à eau Camelbak, montre connectée ultra-technologique dotée d’un altimètre, d’un GPS et d’un mesureur cardiaque… Encore une fois, Ju a mis en valeur sa formation d’ingénieur pour en faire profiter le groupe. Mais il a aussi apporté de l’huile essentielle de lavande pour vaincre les ampoules et autres blessures, nous sommes donc sauvés.

Chaussures de randonnée… Pour cette nouvelle aventure, Br a troqué ses boots contre de vraies baskets. C’est un progrès !

Et le plus important : les trois membres du groupe ont acquis sur Mamazon des flasques. Partir sans cet équipement serait faire preuve d’une inconscience caractérisée.

Le groupe bien préparé et équipé (pour la majorité de ses membres), le départ pour Chamonix approche ! Mais il faut aussi prendre garde à notre régime et adopter, en bons sportifs, une alimentation saine et équilibrée. En chemin, nous nous arrêtons à Annecy pour dévorer de la raclette au Freti, où un menu nous propose de la raclette illimitée : c’est le drame : sur un malentendu, nous en mangeons 900 grammes chacun (1 kilo pour Bi – nous avions commandé 3 fromages différents et avions compris que chaque demi-meule correspondait à un part individuelle. En fait non.), et repartons le ventre lourd direction Chamonix où un hôtel nous attend.

Une doctrine rigoriste

Le lendemain, les choses sérieuses vont commencer. Une doctrine rigoriste va dominer l’aventure. En effet, nous avons conscience qu’il faudra effectuer une trentaine de kilomètres pour environ 1800 mètres de dénivelé positif par jour, et que nos auberges nous attendront le soir autour de 19h – 20h. Il faudra donc garder un rythme exigent pour avoir le droit de manger. Le voyage est organisé par Altitude Mont Blanc, qui a réservé des chambres en dortoirs et des dîners et petits-déjeuners. La doctrine rigoriste consistera donc à tenter de ne pas prendre du retard sur les estimations du nombre d’heures de marche restantes indiquées par les panneaux jaunes sur les sentiers : comme nous le verrons dans le récit, ces panneaux rythmeront l’aventure, suscitant tantôt espoir, tantôt dépit.

Jour 1 : Chamonix Les Flégères – Trient (25 km, 1766 mètres de dénivelé positif)

Conformément aux instructions de notre livret de randonnée, nous nous rendons au téléphérique de la Flégère pour notre premier jour. Après quelques minutes d’attente et d’ascension automatisée, le début de la marche peut commencer. Nous démarrons confiants, puis nous stoppons au bout de quelques mètres après quelques constats : Bi a oublié ses lunettes de soleil dans la voiture ; Ju a oublié sa crème solaire dans un autre sac ; le sac à dos de ville de Br ne convient pas à cet exercice. Tant pis, nous débutons notre ascension vers le Lac Blanc, première merveille de notre séjour.

Le Lac Blanc

Une fois arrivés au Lac Blanc, nous effectuons notre première pause méritée. Bi trempe son pied malade dans le lac, espérant une guérison miraculeuse.

Un bar domine le lac, mais pas question de s’y rendre maintenant : ce serait aller contre la doctrine rigoriste, il faut poursuivre la randonnée ! Nous passons par le Lac de Cheresys à proximité duquel se trouve une échelle pour descendre – Bi s’y cogne le genou, sans conséquence. Les paysages sont déjà magnifiques alors que la randonnée vient de commencer.

Le Col de Balme

Vers midi, première descente assez importante jusqu’au Chalet de la Réserve des Aiguilles Rouges, où nous dégustons notre première Bière du Mont Blanc et notre sandwich. L’après-midi commence par une ascension où nous développons une technique qui ne nous quittera plus de la semaine : suivre Ju dans les montées au rythme dicté par son mesureur de pouls : quand le pouls de Ju est inférieur à 140, nous ne sommes pas essoufflés, et c’est trop facile ! Par conséquent, le nombre de pauses à réaliser peut être limité, conformément à la doctrine rigoriste. Le sommet atteint, nous redescendons vers Le Tour pour nous rafraîchir dans un bar, avant de remonter vers le Col de Balme situé à la frontière franco-suisse. Nous devons arriver ce soit à Trient, notre première étape ! Nous sommes encouragés par un randonneur qui arrive à sa dernière partie du TMB, qu’il a réalisé dans le sens inverse en sept jours. Il nous promet des paysages magnifiques et diversifiés, ainsi qu’une énergie croissante au fil des jours… mais nous prévient que notre projet est ambitieux en découvrant notre planning (notamment le « J4 » dont nous reparlerons plus tard !)

Arrivée à Trient

La descente de 900 mètres se réalise sans encombre en une heure, mais au fil de l’avancée, Ju est de plus en plus silencieux. A Trient, il évoque des maux de ventre. Confiants, nous arrivons dans notre refuge à 19h30. L’aubergiste nous indique que nous sommes « à la bourre », normalement le repas est servi à 19h00. Nous partons à la découverte de notre dortoir et sommes assez catastrophés : un dortoir = deux lits superposés de 2×4 matelas collés, dans une pièce exiguë. Un peu éprouvés par la journée, l’envie de dormir imbriqués dans des inconnus ne se fait pas ressentir. Après le repas, Ju commence à se sentir mieux, mais est toujours barbouillé. Il demande à l’aubergiste s’il est possible de réserver une vraie chambre pour trois personnes, mais le refuge est complet. Finalement, afin de ne pas déranger nos camarades randonneurs, nous obtenons le privilège de séjourner dans l’espace réservé aux guides, car il n’y en a pas aujourd’hui. Le lendemain, nous réserverons des chambres particulières pour les jours suivants, afin de pouvoir dormir après des journées éprouvantes.

 

Jour 2 : Trient – La Fouly (34,5 km, 1820 mètres de dénivelé positif)

Revigorés par la nuit et le petit-déjeuner, nous nous remettons en route. Première ascension vers le Col de la Forclaz, avant de rejoindre la ville de Champex où nous nous restaurons avec trois pizzas. Aujourd’hui, nous sommes munis de crème solaire mais le temps est plus mitigé, quelques averses nous arrosent l’après-midi.

Le « J2 » va-t-il constituer le premier tournant du voyage ? Sur les conseils de BiJu, Br achète à Champex des bâtons de randonnée, et il se met à courir gaiement dans les montagnes, il semble que plus rien ne pourra l’arrêter ! A contrario, la tendinite de Bi semble se réveiller, suscitant les craintes de ce dernier : c’est décidé, une cure intensive de Voltarène et d’Ibuprofène est prescrite pour le restant du périple. Finalement, la douleur « fatale » ne se déclare pas et la randonnée se poursuit.

Nous passons par le sentier pédagogique des champignons, qui nous apprend notamment que les champignons rouges à pois blancs sont toxiques (merci).

La Dranse de Ferret, miroir de l’Oak Creek de l’Arizona !

Après quelques heures de marche, nous atteignons Praz-de-Fort où les panneaux nous indiquent une arrivée d’ici trois heures. Nous constatons qu’une nouvelle fois, nous risquons d’arriver en retard. Il faut donc appliquer strictement la doctrine rigoriste. Après encore quelques montées et descentes, nous rencontrons des touristes anglais qui nous déconcentrent. Il faut toujours se méfier de ses ennemis héréditaires. A l’intersection suivante, nous dévions involontairement de notre itinéraire officiel pour nous hasarder dans le lit de la Dranse de Ferret. Un peu en avance, BiJu s’amusent de la tournure enfin inattendue de la randonnée, tandis que Br commence à pester et à s’agacer des escalades proposées par ses deux compères. BiJu n’osent pas lui faire part d’une de leurs craintes : le pont que nous cherchons pour rejoindre notre chemin vers La Fouly pourrait ne pas être accessible depuis le cours d’eau. Finalement, nous parvenons à retrouver notre sentier, et découvrons les panneaux mettant en garde les randonneurs sur les dangers mortels du « chemin » que nous venons d’emprunter.

Le réservoir d’eau qui aurait pu nous arriver dans la tronche 🙂

Nous approchons de La Fouly, le téléphone de Ju retentit : Altitude Mont Blanc nous appelle car notre hôte s’inquiète de notre retard : l’heure fatidique de 19h00 est dépassée, notre organisateur nous conseille d’arriver pour 18h30 pour les prochaines étapes. Nous pressons donc le pas et atteignons notre auberge.

Au dîner, notre serveuse fait preuve d’une discrétion et d’une sympathie à toute épreuve : elle hurle chaque commande des clients vers la cuisine depuis la salle sur un ton de mégère : « Ils reveulent des patates !! », « Ils veulent de la charcuterie ! » et nous la regardons s’agacer des commandes tardives tandis qu’elle commence à débarasser la salle.

 

Jour 3 : La Fouly – Courmayeur (33,4 km, 1700 mètres de dénivelé positif)

C’est décidé : il faut prendre des mesures pour arriver enfin à l’heure ce soir ! Nous réglons donc notre réveil plus tôt (d’un quart d’heure, ce qui va tout changer), et nous démarrons la randonnée cinq minutes plus tôt que d’habitude. Il va donc falloir amplifier la doctrine rigoriste, essayer de soutenir le rythme dans les montées et accélérer franchement dans les descentes, au désespoir de Br.

Les moutons du Col Ferret

Le début de la randonnée se fait par la route, puis nous gagnons notre sentier montant vers le Col Ferret, qui marque la frontière avec l’Italie. L’entrée en Italie offre un nouveau type de paysage et des roches majestueuses que nous pourrons observer tout l’après-midi, notre sentier prenant la forme d’un balcon. A un rythme plus soutenu que d’habitude, nous poursuivons notre route en prenant une légère avance sur les prédictions horaires des panneaux.

Un paysage « banal » du J3, côté italien…

En fin d’après-midi, un événement inattendu se déclare : Ju a mal au genou droit et se le bande pour pouvoir continuer à avancer sans trop souffrir. L’ascension, plus longue que prévue initialement, se poursuit. Mais la descente vers Courmayeur est ralentie par cet incident, Ju cherchant à préserver son articulation pour éviter un abandon, à la veille du « J4 » tant redouté.

Finalement, nous arrivons à Courmayeur en avance. Après un détour par la pharmacie, nous gagnons Le Vieux Pommier, un établissement sympathique où nous savourons un délicieux repas et gagnons une chambre plus luxueuse que lors des premiers jours. Il est temps de planifier le « J4 » et de préciser les chemins que nous allons emprunter, sachant que Ju est blessé, que Br menace d’abandonner, et que Bi craint une rechute de sa tendinite.

Nous sortons la carte topographique IGN et l’étudions pendant deux heures, à la recherche d’alternatives. Nous recherchons des moyens de transport alternatifs en cas de problèmes, mais c’est impossible : l’étape du « J4 » est constituée par des chemins éloignés des lignes de bus, et il n’y a souvent pas de routes. Les seules alternatives à notre chemin initialement prévu consistent en des traversées de glaciers ou de « passages délicats ». Finalement, nous voyons qu’il est possible de réduire légèrement le début de la randonnée en prenant un bus le lendemain matin à partir de Courmayeur, conduisant à La Visaille. Mais le périple sera encore long, a priori plus de 30 kilomètres, alors que notre petit-déjeuner sera servi tardivement à l’hôtel ! Nous rangeons nos cartes et essayons de dormir, certains membres du groupe étant peu sereins à propos de la prochaine étape.

 

Jour 4 : Courmayeur – Les Contamines-Montjoie (41,4 km, 2050 mètres de dénivelé positif)

Réveil à 8h, nous ne nous sommes jamais levés aussi tard, et pourtant nous nous apprêtons à affronter la journée la plus redoutée de notre tour du Mont-Blanc. Il faut dire que les adaptations de chemin planifiés la veille nous rendent beaucoup plus confiants : nous estimons la journée à environ 30 kilomètres et un dénivelé assez raisonnable. Inutile de dire que la suite des événements ne nous donnera pas raison sur ces derniers points (étrange !).

Après un bon petit déjeuner et 30 minutes de bus qui nous font économiser 7 kilomètres, nous attaquons notre journée par une jolie route montante qui nous mène vers des lacs miroirs. Les paysages sont somptueux et nous prenons le temps de faire des petits détours et d’enregistrer une vidéo loufoque. Après tout, nous avons le temps, nous avons adapté le chemin.

D’après les calculs de Bi et Ju, nous devrions arriver aux alentours de 18h (Ndr : les calculs de Bi et Ju conduisaient invariablement à une estimation entre 16h et 18h, preuve de leur incapacité totale à effectuer quelque approximation.). Nous marchons donc à bonne allure, mais sans zèle afin de nous préserver. Rapidement, Br donne quelques signes de faiblesse et prend du retard, la route montant durant les 10 premiers kilomètres jusqu’au Col de la Seigne (frontière marquant le retour en France). Ce n’est pas le moment de faiblir, le plus gros reste à faire.

Notre première étape se situe au refuge des Mottets, où nous nous restaurons (nous n’avons pas pris à manger aujourd’hui faute de temps !) d’une salade de tomates. Nous nous restaurons (après tout, nous avons le temps) en étudiant la carte. Plusieurs options s’offrent à nous : l’une d’elle nous fait monter encore 1000 mètres et surplomber un glacier, mais elle comporte des passages « délicats ».

Sur le chemin de La Ville des Glaciers

Après quelques débats, nous nous remettons en route et arrivons à La Ville des Glaciers. Nous imaginions une ville prisonnière de la glace, ou des igloos habitués par des inuits. Évidemment, nous avons été déçus d’arriver devant 5 maisons au milieu d’un champ d’herbe au pied d’une montagne. Nous décidons de nous en remettre aux panneaux croisés plus bas dans le village. L’un nous indique « Le Col du Bonhomme » (une de nos étapes) à 2h15, l’autre, par une autre route, à 3h. Nous faisons le choix de la raison et prenons le chemin le plus court.

Br ralentit de nouveau et déclare être au bout de sa vie. C’est mauvais signe (bien que régulier !) si tôt dans la journée : selon nos prévisions, il nous reste encore 7h de marche et beaucoup de descente, et nous n’avons pas vraiment la possibilité de ralentir. Nous accélérons légèrement le rythme pour nous rendre à notre prochaine étape : Les Chapieux, à 55 minutes d’après les panneaux. Nous croiserons un charmant couple du 3ème âge marchant très lentement que nous régalerons de notre épopée et nos espoirs de marche pour le reste de la journée. (Nous sommes en fin de journée, et il nous reste 20 kilomètres et beaucoup de dénivelé à parcourir).

Le sentier est truffé de pièges forçant Br à plier son genou blessé !

1h30 plus tard, nous arrivons aux Chapieux. Nous faisons une pause bien méritée pour attendre Br (à la traîne, comme d’habitude !) et estimer le temps de marche restante. Br finit par arriver… très légèrement avant le couple d’octogénaires qui nous lance un « eh bah à ce rythme, vous n’êtes pas arrivés !! » qui fera beaucoup rire Bi et Ju, mais beaucoup moins Br. Il faut dire que ce dernier s’est blessé au genou, et qu’il souffre dans les descentes. Lui aussi commence donc son régime d’Ibuprofène à partir de cette étape.

Nous passons devant un nouveau panneau.. et là, c’est le drame. Le Col du Bonhomme estimé à 2h15 de marche 1h30 plus tôt est maintenant estimé à 3h… Nous comprenons que la journée prend un tournant et que la perspective d’une arrivée à quatre heures du matin devient plausible. Nous savons aussi que les 12 derniers kilomètres seront à marcher dans la montagne, ce qui rend l’exercice de l’avancée à la lampe frontale nettement plus périlleux.

Nous accélérons donc encore le pas. Le guide de Altitude Mont-Blanc nous indique qu’il nous reste 5h de marche sportive (le même guide qui estime 42km et 2300m de dénivelé à 7h « sans courir »). Quelques minutes plus tard, nous nous rendons compte que, dans la précipitation, nous sommes partis à l’opposé de la bonne direction. Marche arrière. Nous profitons de repasser par le village pour appeler notre hotel et les prévenir de notre retard (cette fois-ci, ce ne sera pas une demi heure.)

La personne au bout du fil s’inquiète pour nous : « si vous devez appeler l’hélicoptère pour venir vous secourir, faites le avant la nuit ! » (Ndr : et encore, nous lui avons menti sur notre position exacte et lui avons donné une coordonnée que nous sommes censés atteindre 3h plus tard). Montée d’adrénaline pour le groupe, mais ce n’est pas fini. Ju se rend compte que la ville dans laquelle nous nous trouvons… est la ville de départ de la variante de 6 jours de notre randonnée (Nous nous retrouvons là à cause de l’erreur de panneau qui indiquait un faux temps de marche, et donc une fausse direction). Il est 17h30, nous attaquons donc une nouvelle journée de marche.

Jour 4.5 : Les Chapieux – Les Contamines-Montjoie

Le groupe doit gravir 950 mètres de dénivelés sur 6 kilomètres, puis effectuer une descente de 1600 mètres sur 12 kilomètres. Les calculs savants de Bi et Ju estiment une arrivée aux alentours de minuit.

Br s’accroche, la perspective d’un retour en hélicoptère ne le séduit pas vraiment. Le tableau suivant indique le dénivelé gravi par heure en fonction des circonstances.

Dénivelé par heure Situation
200 Marche digestive, Br traine des pieds et a envie de mourir
300 Marche vigoureuse avec de nombreuses pauses
350 Marche rigoriste avec une pause par heure
500 Marche avec la menace de se voir envoyer un hélicoptère de secours

BiJu à la fin de l’ascension, le soleil commence à baisser… Br est (un peu) derrière.

Le kilomètre de dénivelé estimé à 3h de marche par les panneaux fut abattu en 1h59mn. Les trois membres de l’équipes arrivèrent exténués au refuge du Col du Bonhomme. Accueillis par un cuisinier du refuge, nous nous sommes vus offrir un morceau de tomme de brebis (englouti, sauf Bi qui le dédaigna).

Restent les 1600 mètres de descente. Le soleil est déjà couché, et la lumière ne tardera pas à disparaître. En marchant à un bon rythme, nous estimons qu’il restera environ 3 heures de marche. Pas très réjouissant pour Br qui a le sentiment de pousser son dernier soupir à chaque pas.

 

Nous marchons maintenant dans la nuit noire, à la lampe frontale, et tentons de discerner les chemins. Les lampes de Bi et Br éclairent à peine, ce qui complique la progression. Au bout d’une heure à peine, une nouvelle difficulté se profile pour Br : sa lampe faiblarde attire une nuée de papillons de nuit (par dizaines) qui ne le lâcheront pas pendant des kilomètres : sur le visage, dans les cheveux, sous les vêtements, ils iront partout. Maigre consolation : un magnifique ciel étoilé nous contemple, nous profitons de ce petit moment de grâce pour éteindre les lampes frontales quelques secondes.

Les pieds de Ju sont en état de catastrophe naturelle, certains orteils comportent déjà 3 ampoules. La progression devient pénible, mais se fait à marche forcée pour ne pas arriver à trois heures du matin (une nouvelle journée de marche nous attend le lendemain !).

Après 2 heures de marche dans la montagne, nous arrivons à une route, à 6 kilomètres de notre arrivée. Nous parviendrons finalement à l’hôtel à 23h50. Mission accomplie. Br et Ju dormiront dans un lit superposé pour nains, et subiront une nuit pénible.

 

Jour 5 : Les Contamines-Montjoie – Les Houches (13,6 km, 1325 mètres de dénivelé positif)

Réveil difficile pour Br et Ju qui ont subi les retournements intempestif de l’un et de l’autre dans le lit superposé. Bi a passé une nuit de rêve et se réveille d’attaque pour la dernière journée de marche. Le parcours d’aujourd’hui ne s’annonce pas particulièrement compliqué, mais il faut prendre en compte les 4 jours de marche précédents, et une contrainte horaire forte : si nous arrivons après 17h, nous ne récupérerons pas nos sacs avant le lendemain matin.

Les Contamines-Montjoie

Après nous être faits troller par le patron de l’hôtel de la veille (« ne sous estimez pas cette journée, cette fois »), nous nous élançons… vers le petit-déjeuner et prenons notre temps. Après avoir tenté de rassurer Br sur la topographie du jour (« ne t’inquiète pas, ça ne monte presque pas. » « au début, il y a un petit dénivelé de 500m et ensuite c’est tout plat »), nous nous mettons en route.

Ju souffre du pied droit (un de ses orteils a maintenant 4 ampoules, un record !) tandis que Br est au mieux de sa forme, c’est à dire au bout de sa vie. (les douleurs au genou ne s’en vont pas et il ne retrouve pas son souffle dans les montées).

Arrivée au Miage

Nous escaladons un sommet puis descendons vers le Miage, charmant petit village touristique où nous nous arrêtons pour souffler. En fait, nous nous arrêtons aussi pour nous préparer mentalement à l’énorme montée abrupte qui se dessine devant nous. Ce sera la dernière de notre tour du Mont Blanc, mais aussi une des plus éprouvantes.

Glacier de Bionnassay.

Les moutons du Col du Tricot

Deux heures plus tard, en haut du col du Tricot, les seuls mots de Br furent « je ne ferai plus jamais ça de ma vie ». Nous avons survécu. Le spectacle est sublime : d’un côté, nous contemplons la vallée du Miage que nous venons de quitter, de l’autre, le glacier de  Bionnassay. Nous sommes accueillis par des moutons noirs et marrons qui tentent de sociabiliser avec Bi et Br, tandis que d’autres fouillent les affaires des randonneurs épuisés.

Nous attaquons notre dernière descente vers le téléphérique de Bellevue. Nous croiserons le pont d’Indiana Jones passant au dessus d’une rivière déchaînée, derniers frissons de notre grande randonnée de 5 jours. Arrivés au téléphérique, il ne nous reste plus qu’à savourer ces moments de calme.

Dernier frissons ai-je dit ? En plein milieu de sa descente, le téléphérique vibre un peu, et s’arrête. La mécanicienne dégaine son talkie-walkie pour alerter le centre de commande et indique que nous sommes à l’arrêt. Après quelques secondes de silence, les voyageurs commencent à s’inquiéter de la manière d’évacuer un téléphérique en altitude. La mécanicienne nous indique que si nous ne repartons pas, nous avons tout le matériel pour évacuer par le bas de la cabine. Après avoir joué avec les nerfs de Br, Bi et Ju sont déçus de constater que l’appareil se remet en marche et amène les passagers à leur destination.

 

Conclusion (145 km, 9500 mètres de dénivelé positif)

Au-delà de la majesté des paysages rencontrés lors de ce Tour du Mont Blanc, c’est la première fois qu’une randonnée BrBiJu est menée à son terme. Nous avons aussi prouvé scientifiquement que la tendinite se guérissait en réalisant ce parcours, à condition de tremper le membre malade dans le Lac Blanc. C’est donc une réussite pour Bi qui ne s’est pas blessé et a réussi à suivre Ju, pour Ju qui a résisté à sa traditionnelle malédiction des ampoules, et pour Br qui a acquis la force mentale nécessaire et ce malgré la douleur !

Nous sommes donc désormais quasiment prêts pour affronter l’Everest très prochainement.

 

Texte : BiJu.
Merci à Ju qui est l’auteur de la plupart des photos.